mercredi 16 décembre 2015

En direct du marché de Camaiore (Capezzano Pianore), tous les lundi.

Un frisson vous vrille les sens à la simple vue de ces collines hérissées de cyprès, de cet escadron d'oliviers et de ces nuances à faire pâlir votre boîte d'aquarelles? Une douce et légère absence vous surprend à l'apparition d'une Pieta dans une chapelle irrémédiablement perdue pour les GPS? Une franche montée de salive vous submerge au passage furtif au devant des fourneaux ou lors d'un louvoiement entre les étals d'un marché siennois? Ce petit creux au plus bombé de votre estomac ne trompe pas! Le régime toscan, vient de surgir dans votre assiette comme une tornade parfumée.

Comment un simple et petit bruit, peut vous mettre en appétit.






Vos pensées vont à ces générations perdues du goût, sans secrets de grand-mères, avec quelques directives du fonctionnement du micro ondes ou un numéro de livreur de couscous aimanté sur le surgélateur pour seule transmission culinaire. Ces générations sans repères qui basculent dans l'auto flagellation des thérapeutiques pétries de sanctions, d'interdits, de peurs attisées, menacées par des tyrans du bien-être. Générations qui s'octroient des intolérances soudaines ou des néologismes sectaires et qui n'envisagent la démarche culinaire que par dépit.
C'est au détour d'un potager florentin sous une pluie féconde que votre décision est prise: plus jamais vous ne vous laisserez à quiconque le droit vous imposer une façon de manger. Puisqu'il y a autant d'appétits que d'individus, il y a autant de régimes que de ventres. Et ça tombe bien: vous êtes Un de ceux-là.

Des tagueurs inspirés se sont affichés bien à propos sur la pyramide du parc delle Cascine à Florence.

Ces senteurs de basilic, d'origan et de miel vous confortent dans vos intentions: vous allez vous refaire ici et maintenant une carte-mémoire des saveurs, un répertoire intime des goûts. Et d'abord, comme le font très tôt les enfants toscans que vous avez observés, vous refaire une charte gourmande en classant, triant, remisant, évaluant et confrontant les goûts, dans une gymnastique quotidienne. Ce que vous soupçonniez prend alors tout son sens: proximité des produits et respect des saisons, fraîcheur et cuissons adaptées, traque sans pitié des meilleurs producteurs (les petits manufacturiers, du torréfacteur ou charcutier sont légion ici, on défend la petite entreprise et le terroir dans des agapes de rue qui peuvent paraître caricaturales aux novices), exécutions humbles et emploi réfléchi des parfums...
Lors de ce retour aux sources, vous allez ré-apprendre les gestes simples, les saveurs uniques, l'humilité des gestes culinaires. Cuisiner n'est pas une performance, rôtir ou étuver ne demandent pas une panoplie d'outils. (S') Offrir un repas est un geste salvateur, un acte fraternel qui ne demande aucune prouesse mais est implacable sur la notion de plaisir. Et le plus difficile sera bien vite de le modérer ce plaisir.

Sans cesse comparer, classer, privilégier...

Des villes ou des champs, le régime toscan est à taille humaine, et cette dimension tend furieusement à disparaître avec l'invasion high tech dans nos cuisines. En vous forgeant une véritable Traité de vos saveurs, votre conduite culinaire sera, sans contrainte ni pitié, intransigeante quant aux produits de votre choix: ils seront de la meilleure qualité, grandis dans des règles strictes du respect de la nature, au service de la joie de se nourrir.
Vous vous sentirez libres et libérés de décider à la place des labels, des bonimenteurs du goût, des marchands d'espoir ou des aigrefins de l'industrie.






Buon appetito